Le mangue beat, histoire d’un bouleversement culturel
Au début des années 1990, le Mangue Beat révolutionnait la culture nordestine en particulier, et brésilienne en général.
A la base de ce mouvement musical, la récupération des sonorités traditionnelles folkloriques et leur mélange avec le rock et les musiques électroniques.
Véritable icône du mouvement, Chico Science (de son vrai nom Francisco de Assis França) en est avant tout le détonateur quand il rapproche son groupe Loustal (rock et black music) d’une formation de percussions du quartier de Peixinhos (Recife), créant ainsi la Nação Zumbi.
Avec son air fragile et malicieux, un petit chapeau de paille perpétuellement enfoncé sur la tête et à la bouche des slogans tels que « les crabes ont un cerveau » ou « une parabole dans la mangrove ! », Chico représente alors, à la tête d’une nation zombie au groove puissant et aux mélanges originaux, l’instantané d’un bouleversement culturel notable.
C’est le moment où l’homme de la périphérie s’approprie les nouveautés technologiques (les ressources numériques de production et de distribution, concentrées sur internet, comme on le verrait quelques années plus tard) et se met à enregistrer sa propre identité de Recifien, de Nordestino, de Brésilien, de tiers-mondiste.
« Les mangues boys et les mangues girls sont des individus intéressés par les bande dessinées, la TV interactive, l’anti-psychiatrie, Bezerra da Silva, le hip hop, la musique des rues, John Coltrane, le hasard, le sexe non virtuel, les conflits éthniques et toutes les trouvailles de la chimie appliquées à l’altération et l’expansion de la conscience », affirme le manifeste reproduit sur le premier album du groupe.
Chico Science disparaît dans un accident de la route en 1997, à 30 ans à peine, laissant son œuvre inachevée.
D’autres artistes (Fred04, Mundo Livre S/A, Mombojó ou encore Cordel do fogo encantado) ont poursuivi le mouvement, qui de musical s’est étendu à toutes les formes d’expression artistique.
Sans jamais retrouver l’énergie prodigieuse que lui avait insuflé Chico Science.
Maracatu Atômico
Nação Zumbi
Anamauê, auêia, aê Atrás do arranha-céu No meio da couve-flor No fundo do para-raio |
Anamauê, auêia, aê Derrière le gratte-ciel Au milieu du chou-fleur Dans le paratonnerre |
Nação Zumbi – discographie
Da Lama ao Caos (1994)
Ce premier album, produit par Liminha (producteur-symbole des années 80) n’a pas capté avec perfection l’impact sonore et conceptuel du groupe. L’éléctronique est encore timide, l’enregistrement des percussions précaire. On dirait un disque de rock sur lequel on aurait collé le rythme du maracatu. Mais sont dejà présentes quelques unes des meilleurs compositions de Chico (A Cidade, A Praieira, Banditismo por uma Questão de Classe, etc) et de ses amis du mouvement (Zero Quatro em Computadores fazem Arte e Rios, Pontes e Overdrive)
Afrociberdelia (1996)
Avec le jeune producteur BiD, la rencontre avec une sonorité définitive et moderne, en même temps puissante, pleine de groove et fourmillant de détails. Un trio d’excellents morceaux (Manguetown et Maco, et la reprise de Maracatu Atômico, établissant ainsi une connexion avec la Tropicália de Gilberto Gil et l’avant-garde de Jorge Mautner) forment la base d’un répertoire long et irrégulier.
CNSZ (1998)
Compilation posthume des explorations musicales de Chico Science.